Elaine Sturtevant (1924 - 2014) US
Son oeuvre consiste, dès les années 60, à faire des répliques d’oeuvres d’autres artistes (A. Warhol, J. Johns, J. Beuys...) juste avant qu’elles soient reconnues sur la scène internationale. (she knew) Associée à tort au courant appropriationnisme (Levine, Prince, Bildo..) des années 80, elle l’anticipe.
Elle s’intéresse au renversement des valeurs, des hiérarchies
de la réalité et de ses représentations.
Elle ne considère pas ses oeuvres comme des copies, mais comme des “répétitions”. Elle révolutionne le concept d’originalité. Elle opère de mémoire ? Elle s’intéresse plutôt à des artistes jeunes, de sa géénration, en début de carrière (ceux citer plus haut). La seule exception : Marcel Duchamp (et cette période : Man Ray..), qui est déjà comfirmé à l’époque.
Elle débute sa carrière en 1965 quand Pollock et ses congénères de l'expressionnisme abstrait règnent sur New York.
Dès 1965, lors de sa première exposition personnelle à la galerie Bianchini, à New York, Elaine Sturtevant met en pièces. Elle y présente, refaits de sa main, des toiles de Jaspers Johns – un Flag – Frank Stella et James Rosenquist, un plâtre de George Segal, un dessin de Rauschenberg et une sérigraphie de la série des Flowers à la façon d'Andy Warhol. Cette dernière est d'autant plus convaincante qu'elle est réalisée avec les écrans que Warhol utilise lui-même et qu'il confie à l'artiste. Elle montre ses répétitions de Warhol seulement quelques semaines après que lui-même les aient commencés.
Sturtevant, comme elle se fait appeler en oblitérant son prénom, s'impose en effet de suivre les processus de création des artistes dont elle décide de répéter les gestes. Il ne s'agit pas de faux, puisqu'elle les expose sous son nom ; ni d'imitations parfaites, puisqu'elle travaille de mémoire plus que d'après des reproductions et admet qu'il puisse demeurer une légère marge d'inexactitude.
L'enjeu est autre et plus intellectuel que plastique. L'originalité est-elle la valeur absolue ? Une œuvre refaite perd-elle toute qualité et tout intérêt pour cette raison ? Dans un milieu new-yorkais dominé par la mythologie virile des héros de l'« action painting », que leurs successeurs du pop art reprennent à leur compte, l'intervention de cette artiste, jeune, femme, impertinente et railleuse suscite l'hostilité.
Cette même année, Sturtevant se place sous le signe de Marcel Duchamp – encore vivant alors – pour une reprise du célébrissime Nu descendant l'escalier, dont son auteur avait lui-même réalisé une réplique avant d'en éditer des reproductions dans la Boîte en Valise. Mais ce n'est pas assez de l'autorité historique de Duchamp pour protéger la sacrilège quand, en 1971 et 1974, elle répète un ensemble d'œuvres de Joseph Beuys dans deux galeries new-yorkaises. Elle fait alors à ses dépens l'expérience de l'ego de l'artiste, tout aussi fort chez Beuys, qui se déclare révolutionnaire, que chez n'importe lequel de ses confrères. Les notions d'originalité et de propriété artistique étant indissociables, quiconque les déstabilise s'aliène le monde de l'art, des créateurs aux galeristes en passant par conservateurs et collectionneurs.
Sturtevant paie l'offense de plus d'une décennie d'effacement : aucune exposition personnelle entre 1974 et 1986. A cette date, la situation a changé. Le mot « appropriationnisme » commence à se répandre pour caractériser des artistes américains pour qui, à leur tour, « refont » du Warhol, du Pollock, du Matisse, du Picasso ou du Duchamp. Sherrie Levine (née en 1947), Mike Bidlo (né en 1953) Richard Prince (né en 1949) sont les figures principales de ce mouvement – fille et fils de Sturtevant, à leur insu ou sans l'avoir reconnu clairement. Elle est confondue avec eux, au mépris de l'histoire.
Cette confusion lui permet de revenir dans les années 80, et elle va s’intéresser à des artistes plus jeunes : Keith Haring, Paul McCarthy, Felix Gonzalez-Torres...
Presque tous les artistes qu'elle a choisis de copier sont aujourd'hui considérés comme des incontournables de leur temps ou de leur style. Les critiques d'art se posent la question de savoir comment elle faisait pour déceler à un stade aussi précoce des artistes aujourd'hui célèbres.
S'agit-il d'un hommage aux artistes souvent inconnus quand elle « clone » leurs oeuvres ou d'un détournement ? Quoi qu'il en soit, en questionnant le droit de reproduction, Sturtevant révolutionne la notion de l'originalité. Et ses vrais-faux influenceront la nouvelle génération, de Richard Prince (qui accumule les procès pour non-respect du droit d'auteur) à Jeff Koons.
Son œuvre est considérée comme partie prenante du mouvement appropriationniste, mais les différences entre l'œuvre des appropriationnistes et l'œuvre de Sturtevant sont grandes. D'abord, les appropriationnistes changent le format de l'œuvre qu'ils copient, tandis que Sturtevant respecte les dimensions de l'œuvre qu'elle répète. De plus, elle trouve ses sources d'inspiration parmi les œuvres de ses contemporains et non pas dans les figures iconiques de l'art moderne, comme le font les appropriationnistes.
lorsqu’une œuvre qui se construit dans les années 1960, anticipatrice, trouve, rencontre son temps, son époque : les années 1990-2000 : la reconnaissance
Son oeuvre consiste, dès les années 60, à faire des répliques d’oeuvres d’autres artistes (A. Warhol, J. Johns, J. Beuys...) juste avant qu’elles soient reconnues sur la scène internationale. (she knew) Associée à tort au courant appropriationnisme (Levine, Prince, Bildo..) des années 80, elle l’anticipe.
Elle s’intéresse au renversement des valeurs, des hiérarchies
de la réalité et de ses représentations.
Elle ne considère pas ses oeuvres comme des copies, mais comme des “répétitions”. Elle révolutionne le concept d’originalité. Elle opère de mémoire ? Elle s’intéresse plutôt à des artistes jeunes, de sa géénration, en début de carrière (ceux citer plus haut). La seule exception : Marcel Duchamp (et cette période : Man Ray..), qui est déjà comfirmé à l’époque.
Elle débute sa carrière en 1965 quand Pollock et ses congénères de l'expressionnisme abstrait règnent sur New York.
Dès 1965, lors de sa première exposition personnelle à la galerie Bianchini, à New York, Elaine Sturtevant met en pièces. Elle y présente, refaits de sa main, des toiles de Jaspers Johns – un Flag – Frank Stella et James Rosenquist, un plâtre de George Segal, un dessin de Rauschenberg et une sérigraphie de la série des Flowers à la façon d'Andy Warhol. Cette dernière est d'autant plus convaincante qu'elle est réalisée avec les écrans que Warhol utilise lui-même et qu'il confie à l'artiste. Elle montre ses répétitions de Warhol seulement quelques semaines après que lui-même les aient commencés.
Sturtevant, comme elle se fait appeler en oblitérant son prénom, s'impose en effet de suivre les processus de création des artistes dont elle décide de répéter les gestes. Il ne s'agit pas de faux, puisqu'elle les expose sous son nom ; ni d'imitations parfaites, puisqu'elle travaille de mémoire plus que d'après des reproductions et admet qu'il puisse demeurer une légère marge d'inexactitude.
L'enjeu est autre et plus intellectuel que plastique. L'originalité est-elle la valeur absolue ? Une œuvre refaite perd-elle toute qualité et tout intérêt pour cette raison ? Dans un milieu new-yorkais dominé par la mythologie virile des héros de l'« action painting », que leurs successeurs du pop art reprennent à leur compte, l'intervention de cette artiste, jeune, femme, impertinente et railleuse suscite l'hostilité.
Cette même année, Sturtevant se place sous le signe de Marcel Duchamp – encore vivant alors – pour une reprise du célébrissime Nu descendant l'escalier, dont son auteur avait lui-même réalisé une réplique avant d'en éditer des reproductions dans la Boîte en Valise. Mais ce n'est pas assez de l'autorité historique de Duchamp pour protéger la sacrilège quand, en 1971 et 1974, elle répète un ensemble d'œuvres de Joseph Beuys dans deux galeries new-yorkaises. Elle fait alors à ses dépens l'expérience de l'ego de l'artiste, tout aussi fort chez Beuys, qui se déclare révolutionnaire, que chez n'importe lequel de ses confrères. Les notions d'originalité et de propriété artistique étant indissociables, quiconque les déstabilise s'aliène le monde de l'art, des créateurs aux galeristes en passant par conservateurs et collectionneurs.
Sturtevant paie l'offense de plus d'une décennie d'effacement : aucune exposition personnelle entre 1974 et 1986. A cette date, la situation a changé. Le mot « appropriationnisme » commence à se répandre pour caractériser des artistes américains pour qui, à leur tour, « refont » du Warhol, du Pollock, du Matisse, du Picasso ou du Duchamp. Sherrie Levine (née en 1947), Mike Bidlo (né en 1953) Richard Prince (né en 1949) sont les figures principales de ce mouvement – fille et fils de Sturtevant, à leur insu ou sans l'avoir reconnu clairement. Elle est confondue avec eux, au mépris de l'histoire.
Cette confusion lui permet de revenir dans les années 80, et elle va s’intéresser à des artistes plus jeunes : Keith Haring, Paul McCarthy, Felix Gonzalez-Torres...
Presque tous les artistes qu'elle a choisis de copier sont aujourd'hui considérés comme des incontournables de leur temps ou de leur style. Les critiques d'art se posent la question de savoir comment elle faisait pour déceler à un stade aussi précoce des artistes aujourd'hui célèbres.
S'agit-il d'un hommage aux artistes souvent inconnus quand elle « clone » leurs oeuvres ou d'un détournement ? Quoi qu'il en soit, en questionnant le droit de reproduction, Sturtevant révolutionne la notion de l'originalité. Et ses vrais-faux influenceront la nouvelle génération, de Richard Prince (qui accumule les procès pour non-respect du droit d'auteur) à Jeff Koons.
Son œuvre est considérée comme partie prenante du mouvement appropriationniste, mais les différences entre l'œuvre des appropriationnistes et l'œuvre de Sturtevant sont grandes. D'abord, les appropriationnistes changent le format de l'œuvre qu'ils copient, tandis que Sturtevant respecte les dimensions de l'œuvre qu'elle répète. De plus, elle trouve ses sources d'inspiration parmi les œuvres de ses contemporains et non pas dans les figures iconiques de l'art moderne, comme le font les appropriationnistes.
Deleuze et Michel Foucault. Répéter n’est pas l’identique.
Répéter est le multiple, ou la multiplicité.
Répéter est le multiple, ou la multiplicité.